Passage(s) - (Nouvelles séries)

Cette création, commencée en décembre 2024, répond à un dispositif road movie — déambulation narrative et temporelle — appliqué à la peinture, sur une seule et même toile de lin de grand format. Le motif initial réalisé au fusain fait l’objet de transformations successives guidées par la plasticité du medium, l’encaustique.

Ainsi, pour ce premier « passage », un tronc de saule renversé par la tempête et s’arcboutant au-dessus de l’Hourquillon, modeste ru en contrebas de l’atelier, devient reflet puis arbre, puis seuls branchages, etc. Des architectures au loin attirent l’œil. Peut-être viendront-elles alors converser avec le végétal à un instant T ?

Le transitoire, le fugitif, le contingent sont convoqués, laissant pour compte « l’éternel et l’immuable » selon la définition baudelairienne de la modernité.

Un ensemble de photographies contrecollées sur aluminium sont enrichis de dessins à la fumée de bougie sur Vélin d’Arches, quelques vidéos et in fine un court métrage de 35 min, l’ensemble témoignant des étapes traversées comme autant de « passages » entre déambulation et bifurcations. Ainsi le processus de création qui bien souvent reste mystérieux pour le regardeur, se donne à voir.

Plus que Baudelaire c’est Walter Benjamin et son livre Passages qu’il faudrait alors inviter pour penser ce dispositif comme jeux de mémoire par effet palimpseste et immédiateté de la présence sensible.

Pour Yolande Agullo, il est question de se saisir d’instantanés perçus ici ou là, dans son proche environnement, lors de déplacements, dans des oeuvres filmées et documentaires, ou encore contés par des interlocuteurs. L’élan créateur ainsi stimulé joue d’une alternance entre un donné à voir et une disparition, se joue de la labilité du temps.

L’encaustique, le décapeur thermique, le fer à repasser, sont les moyens par lesquels le geste du peintre se pense autrement. Foulant la toile au sol pour poser la matière, affinant la trace après avoir érigé le support au mur, de l’horizontalité à la verticalité, et réciproquement, le corps du peintre s’immerge dans une physicalité de la matière et du geste, sans cesse remise sur l’ouvrage.

Quid des Passage(s)  suivants ? Le nuage ? Les espaces océaniques ? L’animal et les espaces libres et sauvages ? Les paysages de ruines ? L’érotique du corps ? Qu’importe le motif. Il s’agit assurément de voies rêvées pour espérer un rendez-vous pictural.

ENCAUSTIQUE SUR TOILE DE LIN — 240 x 360 cm

Fumée de bougie sur Vélin d’Arches – 40 cm x 30 cm